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Les muses de l'orée
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14 août 2009

Les lucioles 6.16

XVI.

 

 

 

C’est étrange. Il me semble avoir rencontré les humains aujourd’hui… Ils ont toujours été présents comme de vagues silhouettes aux contours opaques teintées en aquarelle et je les sentais à peine à côté de moi. On peut ainsi vivre des années dans la même galaxie sans habiter la même dimension. Sans s’apercevoir. Mais aujourd’hui je les ai rencontrés : ils sont faits de chair et d’âme. Et j’ai eu brusquement envie de tous les aimer.

J’ai eu brusquement envie de tous les aimer, je voulais tous les voir : la boulangère et les vieilles gens, le puisatier et la fleuriste, le mendiant. Et le nouveau bibliothécaire aussi. Lui surtout. Il m’a souri cet après-midi, il avait une voix chaude.

Je me suis promenée longtemps. Il y avait dans l’air une tiédeur renaissante toute intime, fraîche. J’aimais la sensation de mes jambes allant d’un pas énergique et insouciant sur les pavés de la vieille ville, je repensais à tous ces moments trop pénibles où j’avais dû rester alitée malgré moi, et je l’appréciais d’autant plus. J’aimais le balancement régulier et ample de mes bras le long de mon corps. Je regardais les visages. Les oiseaux aussi. C’était bon d’être libre. Et je crois qu’il y avait dans cette liberté un équilibre constamment maintenu par une main invisible, entre une aisance physique de se mouvoir, précaire peut-être, et aussi une bouffée d’air vivifiant nouvelle, inaliénable, imprenable : le choix de la compassion, celui de la vie-même. Malgré les rumeurs grondantes de tous les esclavages à venir, toutes les morts possibles, tous les asservissements imaginables, ceux des autres, les miens, contre lesquels il allait falloir batailler sans relâche.

Sans relâche.

 

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