Les lucioles Musique, iconogtaphie
Musique, iconographie
S'il fallait accompagner ce texte d’images ou de
parures, de peintures ou d’estampes où l’on peut trouver un écho visuel aux
scènes, aux décors et paysages esquissés aux détours des mots – une interaction
où il se joue quelque chose d’exaltant, de troublant et que l’on pourrait
appeler un échange sensible, une rencontre d’univers intimes –, j’y glisserais
entre les pages des évocations de...
La chasse aux
papillons de Berthe
Morisot : une jeune femme regarde le peintre, elle tient des deux mains un
filet à attraper les papillons. Son visage est énigmatique, sourire malicieux,
yeux légèrement plissés qui croisent nos regards… A-t-elle saisi au vol le
prétexte d’accompagner les petites en promenade pour revivre des jeux
d’enfant ? Aussi… On peut deviner ce châle léger doucement replié sur ses
épaules comme de petites ailes fragiles, on se demande alors qui chasse ?
Qui est chassé ? N’est-ce pas ainsi le peintre qui, dans sa toile, a saisi
l’éphémère…
Femme assise sous les saules
par Claude
Monet. La lectrice au bord de l’eau est loin de tout. Elle s’inscrit dans le
décor au point de s’y fondre et finit par figurer un nouvel élément de la
nature. Feuilles du livre et feuilles des arbres, les touches de couleur
fusionnent et célèbrent cette communion retrouvée, la ville si loin derrière et
comme absente semble appartenir à un monde étranger.
La Serpentine, avec la forêt en arrière-plan, est un charmant lac par Arthur Rackham, illustration pour Peter
Pan dans les jardins de Kensington. Farandole gracieuse sur les eaux du lac, les fées célèbrent leur propre
évanescence. Qu’ajouter de plus ? Les surprendre dans cette ronde est déjà
un privilège. Merveilles du merveilleux !
Iris
par John Atkinson Grimshau. Elphe des airs, fée mutine ou bouton de
lumière à peine éclos, une apparition ailée s’en va vers le décor… Si bien
qu’on a juste le temps d’en apercevoir le profil, la silhouette gracieuse et
dénudée qui à peine révélée s’échappe déjà. La souveraine du royaume des
lucioles peut-être ?
Le rêve par Carlos
Schwabe : des nymphes irréelles et presque évanescentes baignent d’une eau
purificatrice le corps de l’invitée. Célèbrent-elles ses dons ?
L’initient-elles à leurs propres secrets ? Qui sont-elles qui
semblent prendre naissance des vagues de l’onde elle-même ? Peut-être
seulement un songe, né des larmes d’une âme sensible…
La gamme d’amour par
Antoine Watteau. Des amants épris chantent en chœur, célébrant à deux voix le
miracle de leur rencontre ! Ce sont des vers langoureux, une poésie
lyrique et douce aux inflexions du luth que manie l’amoureux musicien. Le
regard grave d’une statue antique les surveille, comme pour les mettre en garde
de ne pas composer à la légère les gammes du cœur. Fasse la muse des élégies
que leur idylle soit moins inconstante que les jeux galants célébrés dans le
décor, en sourdine, à deux pas !
Mais à côté de la délicatesse, pas très loin en coulisse, il y aurait aussi des photographies de concerts pop-rock, des clichés mitraillés la nuit dans des salles embrumées, en noir et blanc, où le flou mêlé aux tâches de lumière ferait apparaître les visiteurs du soir comme des êtres fugaces, de passage dans un univers non-identifié. On distinguerait parfois en projection sur les murs, ou en hologramme dans l’espace, des clips vidéo et tridimensionnels du XXIème siècle, en couleur…
P’tit voleur,
de Renaud. On enferme dans des geôles bigarrées de maisons de poupées des
voleurs malgré eux, ni crapules ni criminels, pour des peines démesurées qui ne
riment à rien. Les mâtons peu à peu se métamorphosent, révélant leur véritable
nature, mi-homme mi-chien ou animal venimeux rampant le ventre au sol. Domine
comme un acte de résistance l’air du petit accordéon, leitmotiv en filigrane,
pour que les pensées s’envolent vers un peu de liberté!
Respire et Yalil, de Mickey 3D. Quand les arbres
et les fleurs, comme les rires des enfants, se vendent à la chaîne ou se
cachent sous terre… Le soleil est un néon aveuglant. Scénario d’anticipation
imminente.
Mr Writer, Stereophonics.
Les artistes se sont grimés en clowns informels, sourires crispés, fixes,
figés, ils chantent dans des boules de neige de boutiques à trois sous juste
avant que tout explose !
By your side,
Sade, et s’il ne fallait en citer qu’un ce serait celui-ci. Elle erre dans les
bois perdus, un monde couleur de soleil couchant, serrant au passage dans ses
bras les petites gens du voyage, versifiant, bandonéant dans les buissons
pelés… A deux pas des arbres à lucioles qui scintillent par myriades ! Il
arrive parfois qu’elle aboutisse sur le périphérique d’une grande ville, comme
par hasard, elle distribue alors des fleurs aux habitants des lieux, qui sans
attendre s’avancent dans leur automobile vers les feux signalétiques
préprogrammés.
Enfin
une esquisse d’apparence rapide, naïve, mais passionnée et profonde comme
un dessin d’enfant : un Petit cirque
ambulant de tziganes mu par le trait de Fred poursuit son chemin long, si long,
sur un vieux cahier abîmé…