Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Les muses de l'orée

Archives
17 août 2009

Les lucioles Musique, iconogtaphie

Musique, iconographie

 

 

 

 

 

 

S'il fallait accompagner ce texte d’images ou de parures, de peintures ou d’estampes où l’on peut trouver un écho visuel aux scènes, aux décors et paysages esquissés aux détours des mots – une interaction où il se joue quelque chose d’exaltant, de troublant et que l’on pourrait appeler un échange sensible, une rencontre d’univers intimes –, j’y glisserais entre les pages des évocations de...

La chasse aux papillons  de Berthe Morisot : une jeune femme regarde le peintre, elle tient des deux mains un filet à attraper les papillons. Son visage est énigmatique, sourire malicieux, yeux légèrement plissés qui croisent nos regards… A-t-elle saisi au vol le prétexte d’accompagner les petites en promenade pour revivre des jeux d’enfant ? Aussi… On peut deviner ce châle léger doucement replié sur ses épaules comme de petites ailes fragiles, on se demande alors qui chasse ? Qui est chassé ? N’est-ce pas ainsi le peintre qui, dans sa toile, a saisi l’éphémère…

Femme assise sous les saules par Claude Monet. La lectrice au bord de l’eau est loin de tout. Elle s’inscrit dans le décor au point de s’y fondre et finit par figurer un nouvel élément de la nature. Feuilles du livre et feuilles des arbres, les touches de couleur fusionnent et célèbrent cette communion retrouvée, la ville si loin derrière et comme absente semble appartenir à un monde étranger.

La Serpentine, avec la forêt en arrière-plan, est un charmant lac par Arthur Rackham, illustration pour Peter Pan dans les jardins de Kensington. Farandole gracieuse sur les eaux du lac, les fées célèbrent leur propre évanescence. Qu’ajouter de plus ? Les surprendre dans cette ronde est déjà un privilège. Merveilles du merveilleux !

Iris par John Atkinson Grimshau. Elphe des airs, fée mutine ou bouton de lumière à peine éclos, une apparition ailée s’en va vers le décor… Si bien qu’on a juste le temps d’en apercevoir le profil, la silhouette gracieuse et dénudée qui à peine révélée s’échappe déjà. La souveraine du royaume des lucioles peut-être ?

Le rêve par Carlos Schwabe : des nymphes irréelles et presque évanescentes baignent d’une eau purificatrice le corps de l’invitée. Célèbrent-elles ses dons ? L’initient-elles à leurs propres secrets ? Qui sont-elles qui semblent prendre naissance des vagues de l’onde elle-même ? Peut-être seulement un songe, né des larmes d’une âme sensible…

La gamme d’amour par Antoine Watteau. Des amants épris chantent en chœur, célébrant à deux voix le miracle de leur rencontre ! Ce sont des vers langoureux, une poésie lyrique et douce aux inflexions du luth que manie l’amoureux musicien. Le regard grave d’une statue antique les surveille, comme pour les mettre en garde de ne pas composer à la légère les gammes du cœur. Fasse la muse des élégies que leur idylle soit moins inconstante que les jeux galants célébrés dans le décor, en sourdine, à deux pas !

 

Mais à côté de la délicatesse, pas très loin en coulisse, il y aurait aussi des photographies de concerts pop-rock, des clichés mitraillés la nuit dans des salles embrumées, en noir et blanc, où le flou mêlé aux tâches de lumière ferait apparaître les visiteurs du soir comme des êtres fugaces, de passage dans un univers non-identifié. On distinguerait parfois en projection sur les murs, ou en hologramme dans l’espace, des clips vidéo et tridimensionnels du XXIème siècle, en couleur…

P’tit voleur, de Renaud. On enferme dans des geôles bigarrées de maisons de poupées des voleurs malgré eux, ni crapules ni criminels, pour des peines démesurées qui ne riment à rien. Les mâtons peu à peu se métamorphosent, révélant leur véritable nature, mi-homme mi-chien ou animal venimeux rampant le ventre au sol. Domine comme un acte de résistance l’air du petit accordéon, leitmotiv en filigrane, pour que les pensées s’envolent vers un peu de liberté!

Respire et Yalil, de Mickey 3D. Quand les arbres et les fleurs, comme les rires des enfants, se vendent à la chaîne ou se cachent sous terre… Le soleil est un néon aveuglant. Scénario d’anticipation imminente.

Mr Writer, Stereophonics. Les artistes se sont grimés en clowns informels, sourires crispés, fixes, figés, ils chantent dans des boules de neige de boutiques à trois sous juste avant que tout explose !

By your side, Sade, et s’il ne fallait en citer qu’un ce serait celui-ci. Elle erre dans les bois perdus, un monde couleur de soleil couchant, serrant au passage dans ses bras les petites gens du voyage, versifiant, bandonéant dans les buissons pelés… A deux pas des arbres à lucioles qui scintillent par myriades ! Il arrive parfois qu’elle aboutisse sur le périphérique d’une grande ville, comme par hasard, elle distribue alors des fleurs aux habitants des lieux, qui sans attendre s’avancent dans leur automobile vers les feux signalétiques préprogrammés.

 

Enfin une esquisse d’apparence rapide, naïve, mais passionnée et profonde comme un dessin d’enfant : un Petit cirque ambulant de tziganes mu par le trait de Fred poursuit son chemin long, si long, sur un vieux cahier abîmé…


Publicité
17 août 2009

Les lucioles 7

                          VII. ETOILES
 

 

 

Il ne reste plus qu’à guetter, patiemment, peut-être à la tombée du soir, ces êtres si fragiles, si fugaces en ce monde et qui n'en sont que plus précieux encore… éphémères.

Un cœur brave, honnête, bon, une âme émerveillée et alors, comme dans les belles histoires d’avant, de demain…

 

Il fera déjà sombre à l’orée du bois. Vous aurez le corps brûlant. L’amour les appelle. Il y aura une lumière infime dans les sapins. La première. La plus belle. Et jamais vous n’aurez ressenti autant d'émoi. Vous serez un enfant. Une autre lueur suivra, un peu plus près dans les fourrés. Puis une troisième à peine plus loin… Et, peu à peu, vous verrez, votre nuit se parsèmera d’étoiles.

 

 

                                                   

                   Octobre 1993 à décembre 2000.

15 août 2009

Les lucioles 6.19

XIX.

 

 

 

La fenêtre du wagon est ouverte sur le ciel nocturne. Je vois les étoiles ardentes et miraculeuses me parler de leur naissance et des romans des êtres qu’elles ont vu grandir depuis toujours dans ce même berceau galactique où elles ont pu ouvrir les yeux.

Je perçois alors la Terre comme un vaisseau spatial immense, qui va depuis plus de quatre mille cinq cent cinquante quatre milliards d’années dans l’espace intersidéral éblouissant de luminosité. Nous sommes à son bord pour une aventure cosmique, et il nous est donné, à chacun, comme un présent perpétuel, d’osciller entre mousse et capitaine, entre humble héros et vagabond vêtu de gloire. Et je suis certaine qu’à l’instant-même il y a des milliards de passagers qui émettent un rayonnement intermittent et continuel pour être apprivoisés. C’est à nous de rejoindre notre propre quête, pour qu’elle soit prodigieuse...

15 août 2009

Les lucioles 6.18

XVIII.

 

 

 

Pendant longtemps, l’on peut se fourvoyer, s’égarer, en cherchant sans cesse en l’autre une matérialisation de ce que l’on voudrait être, une sorte d’autre soi idéal translaté dans un corps extérieur plus admirable, parfait, et que l’on pourrait enlacer... Pour pouvoir s’étreindre en lui, sans doute, en un semblant de Narcisse pygmalionesque obsessionnel. Ou par peur d’affronter l’inconnu peut-être ? Et l'on sait bien sans l’admettre que lui n’existe pas et l’on daigne croire à tort que les mirages ne peuvent jamais faire de mal à quiconque les crée. Puis renonçant à cette métamorphose en une chimère improbable ou lassé de poursuivre un reflet dans un miroir magnifiant et qui blesse au bout du compte, on délaisse cette course au néant trop folle.

Et un beau jour on se réveille pour partir en quête de l’autre, l’inconnu… pour lui-même. Et c’est ce renoncement à la perfection, cette acceptation de l’autre dans toute sa faiblesse qui nous sauvera. Car c’est cela que l’on peut appeler l’amour, ce ne peut être que cela… L’amour, c’est partir non plus pour soi à la recherche de cet être que l’on attend, l’amour, c’est vouloir donner. Vouloir se donner. Et surtout renoncer pour toujours à l’apparence, à l'arrogance, aux faux-semblants. A l’orgueil.

14 août 2009

Les lucioles 6.17

XVII.

 

 

 

Je m’assois sous mon vieil arbre, mon saule pleureur, qui refleurit ses bourgeons blancs : du pain, de l’eau, des fleurs et des poèmes.

En attendant les amis, l’amour qui sait ?

 

 

 

C’est bien au printemps

Qu’ils dévident leurs fils,

Les saules verdissants,

Et qu’en un beau désordre

S’ouvrent toutes les fleurs.

 

                           Anonyme

Publicité
14 août 2009

Les lucioles 6.16

XVI.

 

 

 

C’est étrange. Il me semble avoir rencontré les humains aujourd’hui… Ils ont toujours été présents comme de vagues silhouettes aux contours opaques teintées en aquarelle et je les sentais à peine à côté de moi. On peut ainsi vivre des années dans la même galaxie sans habiter la même dimension. Sans s’apercevoir. Mais aujourd’hui je les ai rencontrés : ils sont faits de chair et d’âme. Et j’ai eu brusquement envie de tous les aimer.

J’ai eu brusquement envie de tous les aimer, je voulais tous les voir : la boulangère et les vieilles gens, le puisatier et la fleuriste, le mendiant. Et le nouveau bibliothécaire aussi. Lui surtout. Il m’a souri cet après-midi, il avait une voix chaude.

Je me suis promenée longtemps. Il y avait dans l’air une tiédeur renaissante toute intime, fraîche. J’aimais la sensation de mes jambes allant d’un pas énergique et insouciant sur les pavés de la vieille ville, je repensais à tous ces moments trop pénibles où j’avais dû rester alitée malgré moi, et je l’appréciais d’autant plus. J’aimais le balancement régulier et ample de mes bras le long de mon corps. Je regardais les visages. Les oiseaux aussi. C’était bon d’être libre. Et je crois qu’il y avait dans cette liberté un équilibre constamment maintenu par une main invisible, entre une aisance physique de se mouvoir, précaire peut-être, et aussi une bouffée d’air vivifiant nouvelle, inaliénable, imprenable : le choix de la compassion, celui de la vie-même. Malgré les rumeurs grondantes de tous les esclavages à venir, toutes les morts possibles, tous les asservissements imaginables, ceux des autres, les miens, contre lesquels il allait falloir batailler sans relâche.

Sans relâche.

 

14 août 2009

Les lucioles 6.15

XV.

 

 

 

Il y eut bien-sûr des mots et des mots échangés, comme autant de missives omises ou retrouvées, ceux-là sont d’autres fables. Il y eut des arrêts nécessaires à des stations différentes aussi. Et au fil du parcours, autant de replongées graduelles et imminentes dans nos villes d’avant. Comme à New Monopolis, la cité de nos études universitaires, capitale de ce futur monde fédéral en devenir.

Et là tout à coup cette scène sur ce pont de bois dont on avait oublié l’âge et qui traversait le cours d’eau vers la tour ancienne, une ruine, le dernier vestige du château de la Belle au Bois Dormant. C’était un jeune peintre, une femme aux cheveux noirs, du pays du Soleil Levant. Les touristes n’y prêtaient guère attention. Je ne voyais que cela. Elle dessinait au fusain le portrait d’un homme qui posait devant elle et qui devait avoir à peu près son âge. Et moi je n’arrivais pas à détacher mes yeux de ce couple inaccompli. Le portrait était fidèle, avec cependant cette finesse graphique japonaise manga qui sait quand elle est ultime rendre les choses d’une perfection d’un autre monde... Jusqu’à faire paraître la réalité prise en modèle bien terne, bien dérisoire, bien négligeable pour les plus passionnellement épris d'écrans, les prisonniers du virtuel : tragédie d'aujourd'hui. Et en y regardant plus profond l'image esquissée y perdait : plus belle, oui, mais plus froide. L’artiste d’habitude si habile à retransmettre l’émotion dans ses toiles d’un seul de ses traits appliqués à l’extrême, ne parvenait pas à redonner l’intensité du regard. Elle s’acharnait et s’acharnait, pourtant sûre de sa maîtrise technique. Et pour la première fois de sa carrière de portraitiste elle dut se résigner à prendre sa gomme. Mais au premier coup donné, le papier se déchira. Elle sanglota beaucoup. Elle était si jeune. Elle n’avait jamais auparavant rencontré cette expression... Puis bien vite elle se ravisa et reprit son ouvrage, une nouvelle feuille blanc cassé sous ses doigts sublimement fins. Lui souriait sur le dessin. Il était beau. Il souriait dans la vie aussi. Il était magnifique. Il devait se dire qu’elle avait beau répondre mille fois à ses sourires, et jusqu’à pleurer devant son corps éternellement troublé, était-il seulement possible qu’elle daigne s’approcher un jour, juste un peu plus ? Qu’elle voie en lui l’image de cet amour amoureux dont il avait pressenti tant de fois l’avant-goût sans le connaître pleinement, fusionnellement ? Aurait-elle le courage, la témérité d’affronter toutes les craintes à affronter pour pouvoir parvenir dans ses bras à jamais ? Pourquoi lui faire entrevoir des bribes de beauté et le laisser partir désemparé ? Ils ne feraient donc que se croiser ? Tant de cruauté perfide dans une apparence féminine aussi affable, une invitation au désir... Il savait qu’il devait avoir honte de la mesquinerie d’une telle pensée mais elle s’imposait à lui, malheureuse, sans qu’il puisse rien y faire, comme une maladie... Il avait peur, peur de lui surtout, et de la vie plus encore... mais il ne disait rien, comme par maladie... Il était assis dans un fauteuil roulant.

Je partis les yeux en larmes. Sans doute parce que cette fois je ne pouvais que trop le comprendre...

13 août 2009

Les lucioles 6.14

XIV.

 

 

 

« Ta plus belle carte postale cette fois-ci ? lui demandai-je.

- J’ai allumé toutes les bougies d’une basilique romane pour que nos prières soient exaucées.

- Et les tiennes l’ont été ?

- Et les tiennes l’ont été ?»

Et nous de répondre en cœur : «Je vais vous raconter l’histoire d’une jeune fille…» et cette coïncidence nous fit rire aux éclats d’une complicité retrouvée le temps d’un incipit.

 

13 août 2009

Les lucioles 6.13

XIII.

 

 

 

Sa voix qui avait émergé du brouhaha des théories diverses et d’autres conversations plus oisives, cette voix si longtemps relayée par les rythmes et les nuances de ses lettres introspectives aux provenances lointaines et exotiques, fut couverte tout à coup par le sifflement aigu et sonore de la cheminée noire et fer d’une locomotive sans âge. Bientôt par toutes les vitres du wagon, on ne put plus voir qu’une épaisse fumée sombre sans tristesse qui recouvrit tout l’édifice modern style de la gare et le seul quai, vide. Tous les voyageurs avaient embarqué. Le jeu des pistons et des bielles emportant les roues avait mis en branle la machine prise de trépidations impatientes.

Puis le mouvement se régularisa et déjà nous poursuivions notre route.

Elle me demanda de la suivre. Nous nous assîmes face à face bien à notre aise dans des canapés de velours bordeaux de part et d’autre d’une petite table en bois des Indes jonchée de papier à lettres blanc. Il y avait un encrier aussi, d’une forme sinueuse et organique avec dedans une plume de paon majestueuse et irisée. Bleu, vert, mauve. Quelque chose comme un vase et sa fleur.

« Tiens, regarde, je suis sûre que ça t’intéressera. C’est de l’encre à voler. Une trouvaille prodigieuse qui existe partout et tout le temps sans pourtant être réellement là, depuis qu’une âme aime écrire à une autre âme ou à l’univers entier. Une évanescence. Mais il me semble que tu en as fait l’expérience, n’est-ce pas ? J’espère que tu me pardonneras. C’était le seul moyen de te rencontrer dans ton exil, tu sais.

- Je serais revenue de toute façon. Tu n’auras fait que m’aider à choisir le chemin à parcourir pour retrouver mes pas, m’aider à le tracer avec bonheur de manière plus évidente.

- Peut-être.

- Certainement.

- Sans doute.

- Sans aucun doute. Et toi, tu rentres au pays provisoirement comme toujours ?

- Provisoirement.»

Sophie qui ne change pas, ma bonne Sophie avec sa fossette à la joue droite quand elle sourit et ses airs pleins d’astuce de souris amusée. Et toujours ce sanglot invisible parce que l’on s’efforce de ne pas le faire paraître qui prend la gorge dès lors que l’on peut distinguer ses yeux vert clair espiègles et sérieux aussitôt qu’elle arrive, car on sait qu’elle va repartir presque immédiatement. Et que de nouveau il va falloir attendre en retenant son chagrin. Il faut alors se dépêcher de réunir en nous toutes les facultés d’oubli du péjoratif, du pessimiste, du négatif en un mot, et savoir ETRE LA au moment présent, concentrer en soi toute sa conscience, toute la conscience accessible, sur l’instant donné, le seul opportun à la rencontre matérielle, le seul auquel il soit offert de nous voir ensemble en un même temps, un même lieu… jusqu’à une autre fois à savoir rendre plus précieuse. Elle pourrait venir plus souvent, plus facilement, me dira-t-on : pourquoi n’utilise-t-elle jamais la téléportation ? Elle n’aime pas cette facilité-là, trop dénuée de poésie, répondra-elle. Allez convaincre cette voyageuse au long cours de renoncer à cette course-poursuite continue des paysages qui se chevauchent et lui révèlent un peu de leur intimité instantanée en même temps qu’ils lui apprennent un peu de la sienne! Elle ne vous entendra même pas. Mais sans malice pour autant. Il y a en elle ce besoin intrinsèque, cette nécessité physiologique de ressentir la mobilité, le mouvement, mais jamais à l’improviste : elle part vers un point défini par elle à l’avance, peut-être pour ne pas se perdre, peut-être pour essayer de maîtriser la vie. C’est une itinerrante. Alors s’écrire…

 

13 août 2009

Les lucioles 6.12

XII.

 

 

 

Lorsque je pénétrai dans le wagon je fus prise d’un sentiment de nostalgie profond, comme si je m’introduisais dans le monde d’un roman lu sans plus très bien m’en rappeler par la suite. Un monde susceptible d’être visualisé en moi-même mais autrement que par le souvenir d’une expérience vécue et que j’aurais su faire mien le temps d’une lecture. Puis déposé dans les méandres et les mécanismes complexes de la mémoire. D’où il ressurgissait pour se faire réel. Là des Philéas Fogg et autres gentlemen et ladies s’entretenaient en prenant le thé dans des tasses en porcelaine de Chine sur tous les tours du monde envisageables à l’époque contemporaine et tous les autres qu’il restait à fantasmer et à écrire. J’aimais ce raffinement désuet et courtois, cette sensation que de chaque parole échangée dans un vieil anglais devenu purement littéraire aujourd’hui allait naître une trouvaille merveilleuse et scientifique, poétique par la portée universelle et grandiose de tous les possibles à offrir après tant d’abstractions et de rigueurs mathématiques et cérébrales... Un télescope, une roue à aube, une horloge à balancier aux mécaniques alambiquées, une élégie sonore et tridimensionnelle, un cerf-volant cosmique, un nouveau système de vol antigravitationnel à l’état expérimental. Et pourquoi pas la Lune ?

 

Une intonation bienveillante me héla.

« C’est toi ?

- Sophie ! »

Comment avais-je pu ne pas en être certaine !

Publicité
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 > >>
Les muses de l'orée
Publicité
Les muses de l'orée
Publicité